Authenticité. Parler vrai. Honnêteté. Humilité. Humanité.
De biens belles valeurs de marques. Un bien beau projet de “relation” avec le client. Mais en regardant ces mots, en les scrutant, en essayant de les comprendre, on ne peut que se rendre à l’évidence : ce ne sont que des mots. Et ils sont sans saveur, sans valeur.
Ils ne valent plus rien, au regard de ce que nous sommes devenus, au regard de ce que nous vivons, au regard de ce que nous sommes susceptibles de comprendre des marques. Ils ne valent rien s’ils ne sont pas suivis d’actions.
Mais même là — j’en ai peur — ce n’est à mon sens, pas suffisant.
Ne nous racontez pas de fariboles
Nous essayons tous de paraître ce que nous souhaitons être. Nous portons un masque FFP2 sur ce que nous sommes. Seuls quelques privilégiés connaissent nos blessures, nos échecs, nos fêlures, nos folies, ce qui fait que nous sommes Nous.
Les marques font pareil. Elles font tout pour paraître ce qu’elles souhaitent que nous pensions d’elles. Et seuls quelques privilégiés connaissent les doutes, les difficultés internes ou externes…
Avec les années, on est passé de la mise en scène produit (ou service) à l’émotion, pour arriver à la mission de marque. Le tout, joliment drivé par la “Raison d’être” (qui se réinvente en “Raison d’agir” par petites touches). C’est bien, c’est beau, le projet est louable, important. Mais là encore nous ne voyons qu’une face de la pièce. Nous ne voyons que ce que l’on veut bien nous montrer.
Les marques nous sont présentées sous leur meilleur jour et uniquement sous leur meilleur jour. Leur Raison d’être est idéalisée, présentée comme un état de fait et non comme un objectif.
Mais nous, consommateurs, ne voyons bientôt plus cet idéal. Nous passons déjà presque à côté et finirons par totalement fermer les yeux.
Nous sommes le Comex des marques
Et pourtant, nous, consommateurs, citoyens, cibles, audiences, sommes le véritable Comex de toutes entreprises. Nous prenons tous les jours des décisions presque vitales pour ces marques. Nous les achetons ou pas, nous les regardons ou non, nous nous en servons ou pas.
Et pourtant. Nous ne savons rien de ce qu’elles sont vraiment.
Le risque, ce n’est en rien nous, consommateurs, qui le portons. Les marques prennent le risque que l’on se détourne d’elles parce que toute relation doit être donnant-donnant. Et si elles ne nous donnent rien d’elles, nous irons en voir d’autres.
Le consommateur est arrivé à un point où, forcément usé par des années de publicité émotionnelle, il ne sent plus son cœur battre à la moindre promesse d’un monde meilleur.
Il est au courant, le consommateur ; au courant qu’une paire de Nike ne vous fera pas devenir meilleur, qu’un iPhone ne vous fera pas vivre plus intensément et qu’une voiture ne vous fera pas vous sentir libre.
D’autant que…
D’autant que méfiance est mère de sûreté
Et nous ne pouvons que nous en convaincre en jetant un œil aux réseaux sociaux. Juste un œil. Le niveau d’indignation n’a jamais été aussi fort. Le nombre de pensées définitives n’a jamais été aussi grand. Plus rien n’est excusé.
Alors autant ne rien cacher.
D’autant plus si cela peut vous faire gagner. De l’argent. Des parts de marché. Des clients.
Dans une campagne, une activation, un post, un texte, l’authenticité ne dit plus rien. L’honnêteté n’existe plus. Le “parler vrai” s’est pris les pieds dans la peur de choquer et l’humilité n’a, elle, jamais vraiment existé.
Alors “Raison d’être”, oui. “Raison d’agir”, tant mieux. Entreprise à mission, go, bien sûr. Mais pour vous, pour nous et pour le monde (oui, j’ose), demain, soyez guidés par votre humanité et parlez-nous de votre projet. Celui conduit par votre Raison d’être, d’agir ou par votre mission. Montrez-nous le ciel en nous parlant du chemin à parcourir, montrez-nous le sommet en n’oubliant pas que vous êtes encore en bas.
Nous sommes aujourd’hui, je le crois, dans l’ère de la relation sincère entre marque et audiences. Le secret ne fait plus recette, il inquiète (complotisme), la proclamation dérange (besoin de preuves), les héros n’existent pas (ils n’ont jamais existé).
Se rendre vulnérable est, à mon sens, la seule façon de se rendre crédible. En se concentrant sur les progrès à faire et l’impact que l’on veut créer, sans jamais, jamais, tenter de cacher sous le tapis ce qui n’est pas encore nickel !
Ne soyez pas une marque “Gendre Idéal”. Celle qui ne sait que se présenter sous son meilleur jour, de peur de décevoir, de peur de ne pas correspondre à ce que l’on projette sur elle.
Cette marque, par peur de décevoir, va forcément finir par le faire.
Alors, n’ayez pas peur de faire peur.