Liberté chérie.

Oh liberté, je sens ton souffle, je sens ton énergie, je sens que tu me tiens en vie.

Liberté, je sais que tu veux de moi et je sens que je suis à toi. Oh liberté. Que ferions-nous l’un sans l’autre ? Sur les pas de qui marcherais-je ? Sur les pas de qui m’envolerais-je ?

Oh liberté, je suis à toi. Et je ne souhaite qu’une chose, finir serrer dans tes bras.

Et je le sais pourtant. Que tu n’existes pas.

La chute a été rude pour tous ceux qui se sentent vivre en liberté. Accepter de se confiner, c’est d’une certaine façon choisir de faire une croix sur ce sentiment. La liberté, la vraie, n’est forcément pas affaire de choix. Dès que nous prenons une décision, la liberté s’efface à chaque fois un peu plus. Alors à quoi bon lutter. A quoi bon se poser en défenseur de ce qui n’a jamais été ?

Je préfère abdiquer. Et je crois que c’est pour mon bien. Et pour celui de mon métier, puisque rien ne naît jamais d’une liberté pure.

Créativité confinée

Dans les ténèbres, l’imagination travaille plus activement qu’en pleine lumière.

Monsieur Kant

Et je ne sais pas si ce Monsieur a passé beaucoup de temps à réfléchir à cette phrase, mais la période de confinement que nous avons vécue semble lui donner raison.

Rester chez soi, être bloqué, enfermé, ne voir personne, a été une chance. Evidemment pas pour notre confort, pour notre vie sociale ou pour notre santé mentale, mais pour la créativité. De tous. La créativité de ceux dont c’est le métier et celle de ceux qui disent “moi je ne suis pas créatif, mais est-ce qu’on pourrait…”

Pour une fois, la créativité n’appartenait à personne. Et tout le monde s’y est essayé ! Les gens ont commencé à chercher des solutions. Pour s’aérer, pour s’amuser, pour respirer, pour travailler, pour occuper ses enfants, pour éviter d’attraper le Covid, pour faire ses courses, pour se promener. Tout le monde a cherché.

Et certains ont trouvé.

Contrainte, je crie ton nom !

Le confinement a eu ceci de merveilleux qu’il nous a plongé dans la contrainte. Et nous avons dû vivre avec elle, souffrir avec elle et tenter de trouver des solutions avec elle.

Parce que la forme est contraignante, l’idée jaillit plus intense !

Charles Baudelaire

Dans les premiers temps, nous ne sentons qu’elle, la contrainte. Elle pique et la routine nous manque. Mais cet obstacle nous force à trouver un autre chemin pour atteindre nos objectifs.

Le confinement a cassé nos habitudes, il a cassé nos automatismes, il a foutu en l’air nos méthodes de travail, nos process d’idéation. Et il nous a forcé à nous mettre en mouvement, à regarder le monde autrement, à répondre à une nouvelle problématique. Il nous a forcé à chercher, expérimenter, rater, recommencer, tenter et — avec un peu de temps, de sueur au front et d’envie — à trouver.

La contrainte n’enferme pas. Elle libère la créativité, si on veut bien jouer avec elle.

La reine des contraintes : le budget

Et pourtant :

Nous préférons ne pas vous donner le budget pour que vous vous sentiez plus libre et que vous soyez plus créatifs.

Anonyme

Combien de fois ?
Combien de fois a-t-on entendu ça ?
Combien de fois a-t-on entendu ça alors que cette information était primordiale pour débuter le travail de création, de recherche, de ping pong nécessaire à la venue d’une idée correspondant à ce que le client attend et à ce qu’il est en capacité de payer ou non.

Croyez-le ou non, mais une idée à 800K€ aura du mal à rentrer dans la chaussure d’un projet à 80K€. Cette information (même en hypothèse large) a la même valeur que la cible, le quoi, le comment, le qui, le pourquoi… etc.

Si l’idée vaut le coup, nous irons chercher du budget.

Anonyme

Ici, par cette phrase, “opportunité” semble vouloir se nourrir de “créativité” et titiller notre esprit d’aventure. Pourquoi pas, mais dans la balance gagné / perdu, la connaissance du budget est un allié indéniable. Le bout manquant de la carte sur laquelle est indiquée LE piège à éviter.

Le budget ne nous donne pas un cadre, mais l’opportunité de dépasser ce cadre. Il est une contrainte essentielle à la naissance des idées publicitaires, de brand content, social… Déjà parce que l’on s’inscrit toujours dans une enveloppe, mais aussi parce qu’il joue un rôle primordial dans la définition de l’idée en donnant plus de poids à la question : comment ? Et sans budget, la réponse à cette question peut aller dans tous les sens.

Comme le dit Todd :

La créativité est la capacité à réaliser une production à la fois nouvelle et adaptée au contexte dans lequel elle se manifeste.

Todd Lubart

Le budget est important donc. Mais il n’est évidemment pas suffisant !

Le pouvoir de l’ennui.

S’ennuyer, c’est regarder le temps sans savoir qu’il ne s’agit que de ça. Et c’est surtout permettre à son cerveau de se reposer pour lui faire prendre un peu de distance.

Le temps et le vide sont essentiels pour réfléchir, imaginer, créer, rêver sans s’en rendre compte. Plus personne ne sait accepter le vide, mais lorsque nous “attendons”, notre cerveau est actif lui, et il avance sans nous. Il s’est nourrit et il digère ce qu’il a ingurgité et c’est à ce moment-là que l’idée juste a le plus de chance d’arriver.

Pendant le confinement, les gens ont cherché s’occuper. Mais ce n’est pas cela qui les a rendu plus créatifs pour autant #affalédevantnetflix. L’ennui n’est rien s’il n’a rien à se mettre sous la dent. Avant de s’ennuyer, il a fallu s’inspirer, chercher, tester, essayer, chercher encore. L’ennui se nourrit du travail et a besoin de ce travail pour créer.

Le confinement a eu ceci de merveilleux qu’il a réuni deux conditions essentielles à la créativité : la contrainte et l’ennui.

Et il a permis à Philipp Klein de créer ça :